Nationalité japonaise
Née en 1937 à Niigata (Japon). Décédée en 2015
Biographie
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Biographie

Shigeko Kubota, est l'une des premières artistes à avoir exploré le potentiel esthétique, émotif et technologique de la vidéo. Elle a contribué à l'acceptation du support vidéo en tant que forme d'art légitime.


Elle a réalisé des bandes vidéo, des vidéos sculptures, pratiqué la performance. Elle a par ailleurs partagé la vie de Nam June Paik.


Shigeko Kubota étudie à l'Université de Tokyo et obtient un diplôme en sculpture en 1960. Elle commence sa carrière auprès du collectif japonais Group Ongaku. Elle présente sa première exposition personnelle dans la Naiqua Gallery à Tokyo en 1963. Influencée par les carrières de Yoko Ono et de Nam June Paik aux Etats Unis, elle décide de s'installer à New York en 1964. Elle y retrouve George Maciunas, principal fondateur du mouvement artistique Fluxus avec lequel elle avait pris contact au Japon. Elle devient vice-présidente de Fluxus.


Shigeko Kubota poursuit ses études à l'université de New York de 1965 à 1966, puis à la New School for Social Research où elle rencontre le musicien expérimental David Behrman [1]. Elle étudie plus tard à la School of Visual Arts et à l'Art School du musée de Brooklyn. Au début des années 1980, elle est en résidence à l'université Brown (Providence) et à la School of the Art Institute de Chicago.


Ses premières réalisations au sein de Fluxus sont très proches des pratiques féministes de Yoko Ono et VALIE EXPORT à la fin des années 1960. Lors du Summer Perpetual Fluxus Festival de 1965, Shigeko Kubota réalise la performance Vagina Painting dans laquelle, accroupie, elle peint avec de la peinture rouge sur une surface horizontale à l'aide d'un pinceau accroché à sa culotte. Ce travail fait référence à la fois aux dripping de Jackson Pollock, dans la manière de projeter de la peinture sur la toile, et aux anthropométries d'Yves Klein, utilisant le corps de la femme pour déposer de la matière sur la toile. Toutefois, Shigeko Kubota ne définit pas son art comme féministe car elle considère que l'art n'a pas de genre. Cette performance est, pour elle, une expérimentation, une étape importante de son épanouissement en tant qu'artiste. A la suite de Vagina Painting, elle se détache de Fluxus et se tourne vers la vidéo, rendue plus accessible de par la commercialisation en 1967 du Portapak de Sony, première caméra portative.


Shigeko Kubota fait référence à Marcel Duchamp à plusieurs reprises. Elle rencontre l'artiste français en 1968, dans un avion alors qu'ils se rendent tous deux à la première de Walk Around Time de Merce Cunningham [2]. Peu de temps après, elle assiste au Ryerson Theater de Toronto à Reunion, performance de Marcel Duchamp et John Cage autour d'un jeu d'échec. Chaque case de l'échiquier mis au point par le musicien est une touche reliée à un synthétiseur. Une musique électronique aléatoire naît du déplacement des pièces sur l'échiquier. A partir des images que Shigeko Kubota enregistre, elle crée trois œuvres au contenu distinct : Marcel Duchamp and John Cage (1970) – une édition limitée en cinq cents exemplaires d'une boîte  qui rassemble des photographies de l'événement, un 33 tours de l'enregistrement sonore de Reunion, et un texte de John Cage 36 Acrostics re. And not re Duchamp – ; Marcel Duchamp and John Cage (1972) – vidéo associant des images de Reunion et de la tombe de Marcel Duchamp – ; Vidéo Chess (1968-1975) – vidéo sculpture composée d'un moniteur inclus dans un socle, l'écran orienté comme un plateau d'échiquier, reconstituant la partie d'échecs entre John Cage et Marcel Duchamp.


Parallèlement, Shigeko Kubota entreprend au début des années 1970 un projet de vidéos autobiographiques. En 1972, elle produit Europe on ½ Inch a Day la première de ses 'vidéos agenda', carnet de voyage filmé. Avec sa caméra Portapak, elle filme ses rencontres et différents lieux alternatifs dans des villes européennes. Elle réalise également une série, Broken Diary parmi lesquelles, My Father (1975) sur la mort de son père et Video Girls and Video Songs for Navajo Skies (1973), documentaire retraçant son séjour dans une famille Navajo dans une réserve en Arizona. A travers ces vidéos pensées comme des documentaires informels et subjectifs, Shigeko Kubota conçoit l'enregistrement vidéo comme une extension de la mémoire personnelle et collective.


En 2007, Shigeko Kubota présente l'exposition My Life with Nam June Paik à la Maya Stendahl Gallery, à New York, consacrée à l'artiste décédé en 2006. Parmi les œuvres exposées, se trouve Nam June Paik I (2007), sculpture d'une silhouette humaine en métal, debout, sur un socle sphérique. Des moniteurs sont placés sur son visage, son torse, ses mains, ses pieds et diffusent une vidéo tournée à Miami lors d'un séjour du couple. Nam June Paik II (2007) est également une imposante sculpture d'un homme debout sur un socle, tenant dans sa main droite une tête de Bouddha, référence à l'œuvre de Nam June Paik, TV-Buddha (1974) et dans sa main gauche, un violon, rappelant One for Violin Solo (1962). Son torse est constitué de plusieurs petits moniteurs. Dans cette exposition, Shigeko Kubota rassemble des souvenirs personnels et évoque pour rendre hommage à Nam June Paik leurs parcours artistiques et leur aventure commune au sein de Fluxus.



Priscilia Marques


[1] David Berham, né le 16 août 1937 en Autriche, est un compositeur et producteur américain associé au mouvement de la musique expérimentale.

[2] “I met Duchamp on an American Airline flight to Buffalo for the opening of 'Walkaround Time' by Merce Cunningham. It was a cold winter in 1968. The airplane couldn't land at the airport in Buffalo because there was a blizzard from Niagara Falls. We landed at the airport in Rochester, then took a bus to Buffalo. In Toronto later in 1968, I photographed Marcel and John Cage playing chess at the 'Reunion' concert.” In Shigeko Kubota : Video as a Form of Spiritual Collision with the World, cat.exp., Milan, Fondazione Mudima, 1994, p. 38.