![]() | Nationalité yougoslave Né en 1943 à Srpski Vakuf (Royaume de Yougoslavie) Vit et travaille à Nogent-sur-Marne (France) | Biographie Bibliographie Liste expositions |
Né en 1943 à Srpski Vakuf, en Yougoslavie, Slobodan Pajic étudie l’histoire de l’art à Zagreb. En 1966, il s’installe à Paris, et débute son activité artistique par le biais de la peinture, se consacrant à une abstraction géométrique dont les formes lui sont inspirées par une farouche curiosité pour les sciences physiques. Au début des années 1970, il abandonne sa production picturale pour se consacrer aux nouvelles technologies, qui seront dès lors au centre de ses préoccupations : « La révolution scientifique ne peut et ne doit laisser un artiste indifférent puisqu’elle entraîne des changements profonds d’ordre éthique et esthétique. D’où mon abandon des outils et des supports classiques - les pinceaux et la toile - au profit de nouveaux outils et de nouveaux supports - le laser, la vidéo, les ordinateurs ». [1]
Slobodan Pajic s’intéresse dans un premier temps au laser et à la manière dont il se reflète, se réfracte : il utilise notamment cette technologie au Centre Américain de Paris en 1972, pour organiser l’espace selon des motifs mathématiques. Il se consacre ensuite à la vidéo, réalisant en 1976 la bande Destruction du son et de l’image, première production des studios audiovisuels du Centre Pompidou. Pour son inauguration, il présente un projet artistique en 1977 : couvrir la Piazza d'une couche de plâtre sur laquelle sont posées de petites boules de verres remplies de pigments, que le public est invité à piétiner. Si ce projet, censé remplacer la traditionnelle coupure de ruban, n’a jamais eu lieu, la vidéo Passage d'un espace fermé à un espace ouvert en est cependant l'écho, reprenant l’idée des boules de verres, brisées non plus par le public mais par une bille d’acier – ‘l’espace fermé’ serait alors l’intérieur de ces boules, mais aussi par métaphore le Centre Pompidou lui-même, en activité quoi que n’ayant pas encore ouvert ses portes au public. Ces premières réalisations vidéo de Slobodan Pajic, que l’on pourrait au premier abord prendre pour des parodies d’action painting, manifestent en réalité une attention particulière de l’artiste pour les relations que peuvent entretenir violence et création : « En 1975, s’étant vu refuser par la Société de la tour Eiffel l’autorisation de lancer du troisième étage une caméra enregistrant sa propre chute, il avait déclaré : “Un de mes projets les plus importants est l’étude du rapport de l’art et la violence.” » [2]
Dans les années 1980, Slobodan Pajic reprend ses recherches sur le laser, par le biais d’œuvres graphiques et de la bande vidéo SPACE, et entame également une série d’installations intitulée Capteurs d’images. Ces installations sont constituées d’un moniteur sur l’écran duquel des images en noir et blanc sont brièvement projetées : l’écran ayant été au préalable couvert d’une substance photo-luminescente il garde, à la manière de la persistance rétinienne humaine, la trace de l’image après sa projection. Par cette alternance d’images fugitives, dont les traces ne durent que jusqu’à ce qu’une autre image ne vienne les recouvrir, Slobodan Pajic semble mener un double exercice de réflexion sur la vanité de l’activité artistique et de critique de la vacuité de l’image télévisuelle - critique à laquelle est également consacrée la série des Réflecteurs d’image, installations composées d’un écran cathodique transformé en miroir, sur lequel se reflète une bande vidéo répétitive diffusée par un moniteur placé en face de lui.
En 1996, l’histoire de Slobodan Pajic croise à nouveau celle du Centre Pompidou, alors que l’artiste réalise l’installation Mémoires, pour l’exposition « Made in France ». Reprenant le principe des Capteurs d’images, cette installation présente des images de guerre : si Slobodan Pajic choisit alors un sujet ayant profondément marqué l’histoire du XXe siècle, (les images de guerre du cinéma aux actualités télévisées) il choisit dans le même temps un thème qui a saturé la culture visuelle contemporaine.
Depuis les années 1980, l’usage critique des nouvelles technologies qui anime l’œuvre de Slobodan Pajic se situe dans la continuité de la violence de ses premières vidéos.
Philippe Bettinelli
[1] Slobodan Pajic, cité par Nancy-Wilson Pajic in Slobodan Pajic, Casa de Cultura Salvador de Madariaga, Centro Galego de Artes da Imaxe, La Corogne, 1994, p. 6.
[2] Sandra Adam-Couralet, documentation Service Cinéma, Musée national d’art moderne.