Nationalité américaine
Né en 1946 à Boston (États-Unis). Décédé en 2015
Biographie
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Biographie

Chris Burden, né en 1946 à Boston, étudie au Ponoma College puis à l’université de Californie. Il s’intéresse alors à l’art et à l’architecture, mais également à la physique – terme qui par plusieurs aspects pourrait servir à qualifier son œuvre : éducation physique, physique nucléaire, physique appliquée.



Education physique.


Au début des années 1970, Chris Burden se fait en effet connaître en tant qu’artiste par une série de performances mettant son propre corps à l’épreuve. Chris Burden rampe dénudé sur une surface couverte de verre pilé (Through the night softly, 1973), se fait crucifier sur une Volkswagen Beetle (Trans-fixed, 1974) ou encore se fait tirer une balle dans le bras – la célèbre performance Shoot de 1971 à laquelle l’œuvre de Chris Burden sera parfois réduite.


Souvent taxée de sensationnalisme, cette première période de l’œuvre de Chris Burden a pu trouver sa justification dans une démarche phénoménologique relativement simple : partant du constat que nous ne sommes que rarement confrontés aux situations extrêmes qui ont pourtant fini, par le biais de la télévision et du cinéma, par saturer notre imaginaire, Chris Burden se propose de faire l’expérience de ces situations [1]. Si l’on ne retient souvent de Chris Burden que ses performances les plus spectaculairement violentes, il convient de ne pas oublier qu’il teste alors également les limites de son corps dans des performances d’endurance : restant caché dans le faux plafond d’une galerie pendant l’intégralité d’une exposition (White Light / White Head
, 1975), s’enfermant durant plusieurs jours dans un casier (Five Day Locker Piece, 1971) ou encore se faisant scotcher au mur d’un musée pendant ses horaires d’ouverture (Oh Dracula, 1974). 



Physique nucléaire.


Loin de se limiter à une forme d’introspection phénoménologique, l’œuvre de Chris Burden prend petit à petit un tournant plus ouvertement politique. A partir de la fin des années 1970, la question de la dissuasion atomique devient ainsi l’un de ses sujets récurrents. En 1979, Chris Burden l’aborde de manière frontale dans son Atomic Alphabet – abécédaire absurde déclinant pour chaque lettre un mot évoquant l’idée de guerre nucléaire – ainsi que dans l’installation The Reason for the Neutron Bomb – représentant à l’aide de cinquante mille pièces de cinq cents surmontées d’autant d’allumettes l’effectif en tanks de l’armée soviétique. L’œuvre All the Submarines of the United States of America reprend en 1987 cette logique de l’inventaire, présentant par le biais de maquettes suspendues à des fils les six cent vingt-cinq sous-marins de la flotte américaine.


Ces thèmes trouvent également un écho dans deux œuvres de 1992 évoquant la question des pertes étrangères causées par les interventions militaires américaines : l’un des cinq dioramas composant America’s Darker Moments représente ainsi le bombardement d’Hiroshima, alors que The Other Vietnam Memorial reprend le dispositif du Vietnam Veteran Memorial de Washington, mais en donnant à lire une liste de noms de Vietnamiens morts en raison de l’intervention américaine.   



Physique appliquée.


En 1975, Chris Burden réalise l’œuvre B-Car, une automobile entièrement imaginée et construite par l’artiste. Se dessine alors un Chris Burden à mi-chemin entre l’ingénieur et le modéliste : réalisant des répliques en meccano de ponts métalliques ayant marqué l’histoire de l’architecture, faisant s’élever un rouleau compresseur dans les airs par un système de bras pivotant et de contrepoids (Flying Steamroller¸ 1996), ou encore proposant d’améliorer la Tour Eiffel en y suspendant deux copies du Titanic (Another World, 1992)rigueur scientifique, curiosité de l’expérimentation et imaginaire d’anticipation à la Jules Verne, Chris Burden semble aborder l’ingénierie comme un enfant à qui l’on aurait donné les moyens de ses rêveries : en témoignent ses improbables circuits de trains électriques (Moonette n°5, 1994), ou encore le gigantesque circuit de petites voitures qui anime l’installation Metropolis (2004).


A l’artiste choc se serait ainsi petit à petit substitué un artiste inventeur ou mécanicien. En 1985, Chris Burden réalise une œuvre semblant lier ces deux aspects de sa personnalité : intitulée Samson, elle est constituée d’un énorme piston plaqué au travers d’une pièce contre l’un des murs porteurs de l’espace d’exposition. Ce mécanisme, poussant réellement sur la paroi de la salle, pourrait s’il fonctionnait au maximum de sa capacité détruire ce mur et le musée qu’il soutient. Si le Chris Burden ingénieur semble alors avoir retrouvé le Chris Burden des premiers scandales, l’artiste dément toute intention d’iconoclasme :


« Il ne s’agit pas de faire tomber le musée. Je veux que les choses soient claires : je ne suis pas l’artiste qui s’est tiré dessus, ni celui qui fait tomber les musées.» [2]


La performance Shoot, à laquelle la carrière de Chris Burden a trop souvent été réduite, apparaît alors clairement comme un fardeau, un souvenir si encombrant qu’il risquerait d’occulter le présent même : la démission de Chris Burden de son poste d’enseignant de l’UCLA, après que l’un des étudiants ait réalisé une performance durant laquelle il simulait de manière très crédible une partie de roulette russe [3], s’explique peut-être également par le poids de son propre passé. 



Philippe Bettinelli